• Au moment où j’écris ces lignes on est en pleine célébration du tricentenaire de la mort de Louis XIV. Le nom de ce monarque évoque le faste. La vie à Versailles rendait envieux les dirigeants du monde entier. A l’autre extrémité de l’échelle sociale, la situation était loin d’être aussi brillante et l’étude des registres paroissiaux de la fin du XVIIeme siècle nous en offre une étonnante illustration. Si on examine le registre de Viarmes, dans le Val d’Oise en 1693 entre le 24 octobre et le 12 décembre on est surpris de trouver une succession de 25 décès sans aucun baptême ni mariage. Voici deux pages contiguës extraites de cette période.

    le bon vieux temps  

    le bon vieux temps

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Pourtant  le registre est tenu par le curé dans un strict ordre chronologique et on devrait trouver une répartition aléatoire au moins pour les naissances et les décès. C’est d’ailleurs le cas les autres années. A Viarmes et ailleurs, bien sûr, on meurt donc beaucoup en ces temps. L’explication est à chercher dans l’année précédente ou un hiver très rigoureux suivi d’un printemps et d’un été pluvieux ont ruiné les récoltes et fait flamber le prix des céréales. Comme par ailleurs le roi augmente les impôts pour financer ses guerres, la population n’a tout simplement plus les moyens de se nourrir convenablement. Cette famine à selon les historiens provoqué 1.300.000 décès alors que le pays comptait un peu plus de 20.000.000 d’habitants. Mais le plus étrange n’est pas là. En effet, habituellement, dans une période donnée, une partie importante des décès concerne des nouveaux nés et, dans le cas de 1693, il n’y a pas de baptême et donc de nouveau-né dans cette période. La raison est que, au pire moment de la famine, la sous-alimentation a provoqué chez les femmes en âge de procréer une perte des règles appelé aménorrhée. Et, neuf mois plus tard, le taux de natalité chute brutalement.

    Ceux qui souhaitent en savoir plus sur la question peuvent utilement consulter l’article d’Emmanuel Le Roy Ladurie dans les Annales de 1969.

    Cette disette de 1693 n’est pas un cas isolé, et de telles famines se sont produites tout au long des siècles jusqu’au milieu du XIXème. Songeons à la détresse de nos ancêtres en ces époques avant de nous plaindre de nos petits malheurs. D’où le titre ironique du billet.


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