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Où va être enterré Jean Beraud ?
Ce billet et consacré à Jean Beraud et plus particulièrement à son inhumation qui s’est déroulée dans des conditions plutôt inhabituelles.
Jean Beraud est un aïeul de la branche maternelle dans laquelle il porte le numéro Sosa 222.
Il est né le 21 aout 1700 à Chezenas, un hameau situé sur les hauteurs de saint Pierre de Bœuf. Il a épousé en 1734 Françoise Tranchand et le couple a eu onze enfants, ce qui n’a rien d’extraordinaire pour l’époque. Il est aussi le grand père de Rose Françoise Crotte que vous connaissez déjà puisque la naissance, hors mariage, de sa fille Jeanne vous a été contée dans le billet intitulé « Jeanne, enfant de l’amour ».
En 1775, Jean est veuf depuis huit ans et lui-même va rencontrer la grande faucheuse au moi de mai.
Voici l’acte rédigé par le curé Journel lors de son inhumation.
L’an mil sept cent soixante quatorze et le vingt deux [mai]
a été inhumé au cimetière de Saint Pierre de Bœuf jean Beraud
âgé de soixante et quinze ans vigneron à Chezenas défunté
subitement en chemin rendant de Chezenas à Maclas
inhumé par ordonnance des juges de Lyon à nous signifiée
ce jourd’hui a signé ?? greffier en date du vingt deux
mai 1775 en présence de mathieu favier et benoit boucher ce
dernier lettré et non ledit favier
Jean Beraud est donc subitement mort sur le chemin de Maclas. Ni la date ni les circonstances du décès ne sont précisées dans cet acte, mais on peut supposer qu'il est mort la veille de l’inhumation, soit le vingt et un mai qui était un dimanche. Lorsqu’un décès intervenait sans que les derniers sacrements aient pu être administrés au défunt, le curé précisait souvent la cause – accident, incapacité à communiquer- dans l’acte. Rien de tel dans le cas de Jean Beraud, ce qui laisse supposer que rien de suspect n’a été constaté lors de la découverte de sa dépouille.
Reste cette ordonnance des juges pour inhumer le défunt dans la terre sacrée du cimetière qui n’est vraiment pas courante. Je n’ai d’ailleurs rencontré, à ce jour, aucun cas similaire. On voit mal les juges de Lyon se mêler de l’inhumation d’un simple laboureur apparemment bon chrétien. C’est sans doute le curé lui-même qui a pris l’initiative de cette démarche.
L’ordonnance elle même, insérée dans le registre, ne nous en apprend guère plus.
Suivant l’ordonnance rendue
Ce jourd’hui par Monsieur le juge des
Juridiction réunies de Malleval, Virieu et
Chavanay il est enjoint à M Journel Curé de la
paroisse de Saint pierre de Bœuf d’inhumer en
terre sainte le cadavre du nommé Jean Beraud
laboureur du lien de chezenas ditte paroisse à la
représentation duquel cadavre pierre eparvier
gardien sera contraint de livrer au greffe criminel
le vingt deux mai mille sept cent septante cinq
Peut-être faut-il chercher dans le contexte historique l’explication. Louis XVI vient tout juste de succéder à Louis XV, son grand père. Ce règne qui se terminera tragiquement pour le souverain commence par de grandes réformes qui ont dû provoquer dans la population des réactions et créer des clivages. Mon hypothèse est donc la suivante : Jean Beraud se met en avant pour défendre ces réformes et le curé, plutôt attaché au maintien du pouvoir de l’église qu’il sent menacé, utilise les circonstances du décès pour envoyer à la population un signe fort en contestant le droit du défunt progressiste à la terre consacrée du cimetière, plutôt que d’inhumer tranquillement son ouaille sans rien dire aux autorités. Si mon hypothèse est la bonne, on peut dire que le curé Journel s’est fourvoyé, puisque les juges, plus fins politiques et sans doute mieux informés des tendances du pouvoir central lui ont ordonné de mettre de coté ses doutes sur l’opportunité d’accueillir la dépouille de Jean Beraud en terre consacrée.
Mais peut-être aussi que le curé Journel se contentait d’appliquer les instructions reçues de ses supérieurs. Car, le moment venu, il prendra part au grand chambardement. Son nom apparait dans le procès verbal de l’assemblée des trois ordres chargé de rédiger les cahiers de doléances le 16 mars 1789.
C’est même lui qui rédigera les derniers actes consignés sur les registres paroissiaux le 30 décembre 1792, preuve qu’il accepta de prêter serment à la constitution.
Son nom continue d’apparaitre sur les registres d’état civil en 1793 avec la mention « Journel curé officier public » puis « Journel officier public » tout court.
Alors toute cette histoire n’est peut-être que le pur produit de mon imagination.
Qu’en pensez vous, chers lecteurs ?
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Commentaires
2cécilebonnetonSamedi 23 Novembre 2013 à 14:503Céline QuagliataLundi 25 Novembre 2013 à 07:25L'acte du curé est-il bien en date de"1774" ?
Pour l'hypothèse, il est possible que le curé a eu une petite prise de conscience en quelques années et effet, il a "changé de bord"?
En tout cas on vivait vieux dans la famille (pour l'époque)
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Qui parlait de l'imagination débordante des habitants de la rive gauche? La banlieu parisienne n'est pas mal, non plus.
Les deux hypothèses sont plausibles et, sans infomations sur la personnalité des deux protagonistes, ni sur leur relations, je me garderais bien d'en privilégier une.
Je rajoute mon petit grain de sel, avec un des chemins possibles sur lequel le pauvre Jean a été retrouvé.