• Une nouvelle fois, cette histoire commence par un mariage, ou plutôt deux mariages. Le premier, célébré à Asnières sur Oise le trente avril mil sept cent quatre vingt deux, unit Jean Baptiste Beaucé à Marie Anne Patry. Le second est célébré à Viarmes le vingt six octobre mil sept cent quatre vingt neuf. Il unit Louis Auguste Langlois et Catherine Honorine Breteville.

    Toutes ces personnes sont de lointains cousins de l'auteur de ces lignes.

    Voici l'acte de mariage de jean baptiste Beaucé et Marie Anne Patry

    Une double inconstance Val d'Oisienne

      

    Une double inconstance Viarmoise

     

    L'an mil sept cent quatre vingt deux le mardi trentième jour

    d'avril après la publication des bans du futur mariage faites aux

    prônes de cette paroisse par trois différent dimanche savoir le

    quatorze, le vingt et un et vingt huit avril présent mois et an

    et en celle de Viarmes ainsi qu'il nous a paru par le certificat du Sr

    curé de ladite paroisse en date du vingt neuf avril présent mois signé

    lemaire curé de Viarmes sans qu'il s'y soit présenté aucune opposition

    les fiançailles célébrées le jour d'hier entre Jean Baptiste Beaucé

    milicien fils mineur de Jean Baptsite Beaucé voiturier et de Marie

    jeanne Caho de la paroisse de Viarmes de ce diocèse d'une part et

    Marie Anne Patris fille mineure de Louis Patris couvreur en tuiles

    et de Marie Anne Bertin de cette paroisse d'autre part et par

    la permission accordée audit Jean Beaucé milicien mar Mr l'intendant 

    de la généralité de Paris par laquelle il lui est permis de se marier

    quand bon lui semblera expédiée à Paris le dix sept avril

    présent mois et signée Bertier et demeurée en nos registres pour

    sureté conformément à l'ordonnance du roi. j'ai soussigné curé d'Asnières

    sur Oise après m'être assuré du consentement mutuel desdits futurs époux leur

    ai donné la bénédiction nuptiale suivant les cérémonies de l'église en

    présence du coté de l'époux Jean Baptiste Beaucé père Lucien Tiénard et

    du coté de l'épouse Louis Patris son père et Pierre Payen son ami et autres

    parents et amis

    Voici l'acte de l'autre mariage entre Louis Auguste Langlois et Catherine Honorine Breteville :

    infidelités 1

     

    Pourquoi faire simple quand....

    L'an mil sept cent quatre vingt neuf le vingt

    sixième jour du mois d'octobre après la publication

    des bans du futur mariage entre Louis Langlois

    soldat milicien fils de Louis Langlois dit tout patry

    vigneron et de Marie Jeanne Poulet ses père et mère d'une

    part et entre Marie Catherine Breteville  fille 

    mineure de Etienne Breteville dit cardot vigneron

    et de défunte Anne Françoise Davanne ses père et mère

    d'autre part tous deux de cette paroisse faites 

    aux prônes de nos messes paroissiales par

    trois jours différents et consécutifs à savoir le

    huit de septembre le treize et le vingt du même mois

    sans qu'il se soit trouvé aucune opposition

    ou empêchement ni civil ni canonique vu la

    permission du mariage accordé par Mr Bertier

    audit Louis Langlois soldat milicien la date  du

    trente octobre mil sept cent quatre vingt huit j'ai

    prêtre curé de cette paroisse soussigné reçu

    après les fiançailles célébrés d'hier aujourd'hui

    en cette église leur mutuel consentement et leur

    ai donné la bénédiction nuptiale selon toutes

    les cérémonies prescrites par notre mère la sainte

    église ledit Louis langlois futur époux assisté de

    Louis Langlois son père de Auguste Poulet

    et Jean Poulet ses oncles maternels ladite 

    Marie Catherine Breteville assistée de Etienne

    Breteville son père de Louis Etienne Breteville

    son frère et autres  L'époux, l'épouse le père

    Etienne Breteville ont déclaré ne savoir signer

    interpellés selon l'ordonnance  les autres

    ont signé avec nous

    Maintenant que nos deux couples sont formés, nous allons pouvoir passer à  la suite des évènements qui se déroulent presque tous dans le village de Viarmes, même si un des deux mariages a été célébré à Asnières sur Oise, village tout proche, en respect pour la tradition qui veut qu'on se marient sur le lieu d'origine de la future épouse.

    Au début, tout se passe de façon classique. Dans le couple Beaucé/Patry, un enfant, nommé Jean Louis Beaucé, va naître le trois novembre mil sept cent quatre vingt douze, à peine plus de six mois après le mariage de ses parents, ce qui laisse à penser qu'il a été conçu bien avant le passage devant monsieur le curé. Les fidèle lecteurs de ce blog savent que ceci n'a rien d'exceptionnel et que la tolérance aux aventures prémaritales était bien plus grande qu'on le pense généralement. Jean Louis ne vivra qu'un an. le même prénom sera donné au garçon né en mil sept cent quatre vingt quatre. Viendront ensuite Hypolite né en mil sept cent quatre vingt sept et mort en mil sept cent quatre vingt dix et Marie François Irène, née en mil sept cent quatre vingt treize. Le couple a donc eu quatre enfants, ce qui est plutôt peu pour l'époque.

    Du coté des Langlois/Breteville l'histoire vécue est pratiquement identique. Marie Catherine Langlois nait le vingt cinq janvier mil sept cent quatre vingt dix, trois mois seulement après le mariage de ses parents, ce qui confirme ce que j'ai écrit plus haut à propos de la banalité d'une telle situation. Suivront Pierre Louis né en mil sept cent quatre vingt douze qui mourra à l'âge de cinq ans, Geneviève Marine qui ne vivra guère plus d'un mois Louis Ovide, né en mil sept cent quatre vingt quinze et enfin Marie Anne Lucie née en mil sept cent quatre vingt seize.

    l'évènement suivant dans la vie de nos deux couples va nous sortir de cette routine. Cela se passe le douze mars mil sept cent quatre vingt dix huit. Une dénommée Geneviève Elisabeth Beaucé, sœur de Jean Baptiste Beaucé donne naissance à une fille à qui sera donné le prénom de Louise Nicole. Voici l'acte dressé à cette occasion extrait du registre de Viarmes.

    La double inconstance à Viarmes

      

    Aujourd'hui le vingt deux du mois de ventôse de l'an six

    de la république française une et indivisible par devant

    moi Jean Gilles Soret agent municipal de la commune de

    Viarmes canton de Luzarches département de Seine

    et Oise pour rédiger a constater les actes de naissance

    mariage et décès des citoyens suivant la loi du vingt

    septembre mil sept cent quatre vingt douze est comparu

    au lieu de mon domicile les citoyens Louis Langlois

    jardinier du citoyen Harmand âgé de trente sept ans 

    François Duru vigneron âgé de trente neuf ans et

    Nicole Davanne âgée de vingt cinq ans parrain et marraine

    tous trois de cette commune m'ont dit et déclaré à moi

    agent municipal que Geneviève Beaucé, fille de Louis

    âgée de vingt cinq ans et non marié était accouchée

    aujourd'hui à huit heures d'un enfant féminin

    à son domicile rue de la chaussée et m'a été présenté à

    mon domicile et lui a été donné pour nom Louise Nicole

    Françoise et d'après cette déclaration que Louis Langlois

    s'est présenté ce disant être le père de l'enfant François Duru 

    le parrain et Nicole Davanne la marraine. J'ai rédigé la

    présente acte que Louis Langlois a signé le parrain et la

    marraine ont déclaré ne savoir écrire ni signer. Le jour mois

    et an que susdit suivant la loi

    Louise Nicole Françoise est donc né hors mariage. Celui qui reconnait être son père devant l'officier public qui rédige l'acte de naissance se nomme Louis Langlois. S'agit-il de  époux de Catherine Honorine Breteville ? Il dit avoir trente sept ans au moment où il reconnait cette paternité, ce qui situe sa naissance vers mil sept cent soixante et un. Et le possible père adultérin est né en mil sept cent soixante quatre. Un écart de trois ans n'a rien de particulièrement étonnant à une époque où les gens n'avait qu'une vague idée de leur propre âge. Langlois est un nom très commun à Viarmes, tout comme le prénom Louis, mais aucun Louis Langlois autre que notre candidat ne remplit les conditions aussi bien.

    S'il subsistait un doute, il sera levé le dix janvier mil huit cent comme le montre l'acte rédigé à Luzarches dont je vous propose la lecture :

     La double inconstance à Viarmes

     

      

    La double inconstance à Viarmes

     La double inconstance à Viarmes

      

    aujourd'hui décadi vingt nivôse an huit

    de la république française une et indivisible

    heure de midi par devant moi Louis Claude

    le Flamand agent municipal de la commune de

    Luzarches département de seine et oise

    opérant pour les vacances

    du président de l'administration municipale

    du canton dudit Luzarches et autorisé 

    par l'article quatre de la loi du treize fructidor

    de l'an 6 à remplir les fonctions d'officier de

    l'état civil quant à la célébration des mariages

    accompagné du secrétaire de ladite admisistra

    tion sont comparus au lieu de la réunion

    décadaire pour contracter mariage d'une

    part Louis Auguste Langlois âgé de trente

    cinq ans jardinier domicilié à Viarmes fils

    de Louis Langlois vigneron et de Marie

    Jeanne Poulet son épouse et divorcé

    d'avec Catherine Breteville d'autre part

    Geneviève Elisabeth Beaucé âgée de

    vingt huit ans fille de Jean Baptiste

    Beaucé et de Marie Jeanne Cahos

    domiciliée audit Viarmes

    Lesquels futurs conjoints étaient

    accompagné de Jean Baptiste Beaucé

    père de la future Pierre Poulet

    ami des futurs cultivateur âgé de quarante

    et un ans Pierre Honoré Raillier vigneron

    beau frère du futur âgé de trente quatre

    ans Jean Baptiste Langlois frère du futur

    journalier âgé de trente quatre ans et

    Nicolas Brador juge de paix de ce canton

    âgé de quarante et un ans les trois premiers

    demeurants à Viarmes le quatrième à Luzarches

    moi Louis Claude le Flamand après avoir

    fait lecture en présence des parties

    et des témoins 1° l'acte de naissance 

    de Louis Auguste Langlois en date du

    deux septembre mil sept cent soixante

    quatre qui constate qu'il est né à

    Viarmes du mariage légitime de Louis

    Langlois et de Marie Jeanne Poulet

    2° de l'acte de naissance de  Geneviève

    Elisabeth Beaucé en date du dix sept

    juin mil sept cent soixante et onze

    portant qu'elle est née audit lieu de

    Viarmes du mariage légitime entre

    Jean Baptiste Beaucé et Marie jeanne

    Cahos 3° de l'acte de divorce du

    dit Louis Auguste Langlois en date du

    quatorze nivôse an sept prononcé par

    l'agent municipal de Viarmes dûment  enregistré

    à Luzarches le trois pluviôse suivant 4° de

    l'acte de publication des promesses de mariage

    entre les futurs conjoints dressé par ledit

    agent municipal de Viarmes le quinze nivôse

    présent mois et affiché

    tous lesdits actes en bonne forme après

    aussi que Louis Auguste Langlois et Geneviève

    Elisabeth Beaucé ont eu déclaré à haute

    voix se prendre mutuellement pour époux

    j'ai prononcé au nom de la loi que

    Louis Auguste Langlois et Geneviève Elisabeth

    Beaucé sont unis en mariage et j'ai rédigé

    le présent actes que les parties et les témoins

    ont signé avec moi ainsi que le directeur

    de ladite administration à l'exception de

    l'épouse qui à déclaré ne savoir écrire 

    ni signer de ce interpelée fait audit lieu

    de la réunion décadaire les dits jour mois et

    an que de l'autre part

    Tout est dorénavant clair, Louis Auguste Langlois et Geneviève Elisabeth ont eu une relation adultère et le fruit de cette relation est venu au monde à peine plus d'un an après la naissance du dernier enfant que louis Auguste Langlois a eu avec son épouse légitime, Catherine Honorine Breteville. En fait, le terme de totale clarté n'est pas tout à fait approprié. 

    En effet, on trouve dans les registres paroissiaux de Viarmes en date du quinze juillet mil sept cent quatre vingt douze l'acte que voici :

    La double inconstance à Viarmes (1)

     

    l'an mil sept cent quatre vingt douze le dimanche

    quinzième jour du mois de juillet a été baptisée

    par moi prêtre soussigné une fille nommée

    Geneviève Louise née aujourd'hui fille

    naturelle de Geneviève Beaucé dite rigote de cette

    paroisse Le parrain François Beaucé

    manouvrier la marraine Geneviève Joséphine

    Cousin tous deux de cette paroisse qui

    ont déclaré ne savoir signer de ce interpelés

    selon l'ordonnance 

    Nous ne saurons jamais qui était le père de la petite Geneviève Louise, qui ne vivra que quelques jours. On ne peut cependant pas exclure qu'il s'agisse de Louis Auguste Langlois, vu les évènements qui ont suivi cette naissance. Si tel est le cas, cela situerait cet enfant illégitime entre le premier et le second enfant de sa famille légitime. Louis Auguste Langlois a-t-il eu une double vie ? dans un petit village tel que Viarmes ou il devait être bien difficile de garder une telle liaison secrète on imagine que les relations entre les familles devaient être un peu tendues.

    Amis lecteurs, si vous trouvez que le titre de ce billet est trompeur pour une simple histoire d'adultère, rassurez vous, elle ne s'arrête pas là. Un second billet, à venir prochainement, devrait vous convaincre que le titre n'est pas usurpé.

     

     


    5 commentaires
  • Notre monument aux morts virtuel s'enrichi dans ce billet avec le malheureux Charles Alexandre Meunier, natif de Viarmes, mort en Espagne pendant la campagne menée par Napoléon Bonaparte dans la péninsule ibérique.

    Charles Alexandre avait tout juste vingt ans, il laissait Jeanne Louise Poulet, sa veuve, qu'il avait épousé en juillet mil huit cent neuf, à peine plus d'un mois avant de rejoindre son corps d'affectation.

    En plus de raviver le souvenir de ce jeune homme qui aura bien peu profiter de la vie, ce billet est l'occasion de mettre en évidence la fragilité des informations utilisées par les généalogiste pour leur travail.

    Il faut comme presque toujours commencer par lire l'acte consigné sur le registre de la ville par le dénommé Bourcier, adjoint au maire. Cet acte est écrit en novembre mil huit cent onze, plus d'un an après le décès de Charles Alexandre Meunier. 

     

    Mourir à Zamora

     

    Pour mémoire  Empire Français

    Ministère de la guerre

    D'après l'ordre du ministre,

    Le secrétaire général du ministre de la

    guerre certifie qu'il résulte des registres au bureau

    de l'état civil et militaire de l'armée, que

    le sieur Charles Alexandre Meunier, fils de

    François et de Geneviève Antheaume, né

    en 1790, à Viarmes, département de Seine et Oise,

    chasseur au 4e régiment d'infanterie légère, entré

    au service le vingt trois août dix huit cent neuf

    est mort par suite de fièvre à l'hôpital de

    Lamora en Espagne le vingt trois août dix

    huit cent dix.

    En foi de quoi il a délivré le présent certificat

    pour servir et valoir ce que de raison

    fait à Paris le 28 octobre 1811

    Cet acte nous apprend que Charles Alexandre Meunier est mort à l'hôpital des suites de fièvre. Nous ne connaissons pas la cause de cette fièvre, mais nous savons que les conditions sanitaires dans lesquelles vivaient les troupes était loin d'être idéales. Les maladies infectieuses faisaient des ravages et ont mourrait beaucoup pendant ces campagnes et pas toujours pendant les combats.

    L'acte nous apprend aussi que le malheureux est décédé à l'hôpital de Lamora. Le seul lieu avec un nom proche que j'ai pu identifier est La Mora, situé près de Tarragone, à l'ouest de Barcelone sur la cote méditerranéenne de la péninsule espagnole. Les différents documents relatant la campagne ne montre aucune activité dans cette région à cette période.

    Le travail extraordinaire effectué par David Dalin sur le 4e léger, unité à laquelle appartenait Charles Alexandre Meunier, situe une partie de ce régiment près de la frontière du Portugal, au nord. Comment notre infortuné chasseur est-il allé mourir à six cents kilomètres de là ?

    Une fois n'est pas coutume, cette énigme va trouver sa solution. C'est une dans les registres de la ville de Viarmes dans les pages consacrées au mois de février mil huit cent treize que se trouve la clef, dans l'acte que vous trouverez ci-dessous.

    Mourir à Zamora

     

    pour mémoire de 

    feu Meunier Charles

    Alexandre décédé

    aux armées le 23 du

    mois d'août 1810

    Extrait mortuaire commune de Zama

    arrondissement de la haute Espagne, hôpital

    temporaire de Zamora

    Du registre des décès dudit hôpital a été

    extrait ce qui suit; Meunier Charles

    Alexandre , chasseur à la troisième compagnie

    quatrième bataillon du quatrième régiment

    d'infanterie légère, âgé de vingt ans, natif de

    Viarmes canton de Luzarches, département

    de Seine et Oise, est entré audit hôpital le dix

    sept du mois d'août de l'année 1810 et y est

    décédé le 23 du mois d'août de l'année 1810

    par suite de fièvre. Je soussigné directeur

    dudit hôpital certifie le présent extrait véritable

    et conforme au registre des décédés dudit hôpital.

    fait à Zamora le vingt trois du mois d'août

    1810 signé Feraud; nous commissaire des

    guerres chargé de la police de l'hôpital de

    Zamora certifions que la signature ci dessus

    est celle de Mr Feraud, directeur et que foi

    doit être ajoutée Fait à Zamora le 23 du mois

    d'août de l'année 1810, signé de Saint Leu

    avec paraphe

    Pour une mystérieuse raison, l'officier d'état civil s'intéresse de nouveau au décès de Charles Alexandre Meunier. Dans la transcription du registre de l'hôpital où notre chasseur est décédé on peut lire le nom de la localité où se trouve l'hôpital en question et le Lamora du premier acte est devenu Zamora.

    Et cette ville située près de la frontière nord du Portugal cadre bien mieux avec les mouvements de troupes de l'année mil huit cent dix. On la voit d'ailleurs sur une carte extraite du site évoqué plus haut.

    Mourir à Zamora

     

    J'ai donc pu mettre à jour la localité de décès de Charles Alexandre Meunier dans l'arbre généalogique, corrigeant l'erreur du registre de mil huit cent onze.

     


    votre commentaire
  • Si le père Goubet, propriétaire d'une ferme au Buron, sur le territoire de la commune de Cour et Buis en Isère, ferme qu'il vendra, une vingtaine d'années plus tard, à ma sœur Mireille et à son époux Guy, si donc le dit Goubet était hors de sa maison un peu avant treize heures trente en ce mardi dix mai de l'an mil neuf cent cinquante cinq, pour prendre l'air après avoir bu son café, peut-être a-t-il remarqué au dessus de sa tête le Breguet F-BASQ, volant vers le nord à une attitude anormalement basse.

    Aux commandes de cet avion, le commandant Gérard Caillat est aux prises à des difficultés mécaniques qui l'obligent à chercher un lieu propice à un atterrissage d'urgence. C'est finalement dans un champ de blé, à une dizaine de kilomètres du Buron que le vol, parti de Tunis et censé aller jusqu'à Bron, dans la banlieue de Lyon, se terminera au lieu dit La Pape, sur le territoire de la commune d'Estrablin.

    Vous pouvez voir sur cette carte d'époque, issue du site Géoportail, le lieu où le Breguet s'est posé.

    Une sortie dominicale

      

    Sur cette seconde carte, toujours issue du site Géoportail, vous pouvez voir le lieu-dit du Buron, et le lieu de l'atterrissage, matérialisé par une étoile.

    Une sortie dominicale

    Les quarante deux passagers de l'avion, tous indemnes après cet atterrissage mouvementé, peuvent remercier le pilote dont l'habileté a évité une catastrophe bien plus grave.

    Je vous propose, issu du site Gallica, un extrait de la revue Aviation Magazine du quatorze juillet mil neuf cent cinquante cinq consacré à cet accident ainsi qu'au sauvetage de l'avion. Le texte est assez petit, je vous conseille de cliquer sur l'image afin de visualiser cet article en pleine page.

    Une sortie dominicaleL'évènement eu un retentissement considérable tant au niveau local que national. Je n'avais que cinq ans et demi lorsqu'il s'est produit et je m'en souviens encore aujourd'hui. C'est d'ailleurs vraisemblablement moins à cause de l'évènement lui même que du contexte familial dans lequel nous l'avons vécu que ce souvenir est aussi vivace.

    Jojo, mon regretté papa était, en mil neuf cent cinquante cinq, l'heureux possesseur, sans doute depuis peu, d'une motocyclette, premier engin motorisé dans l'univers familial. Il s'agissait d'une 125cc de marque Jonghi. Je ne me souviens pas du modèle exact mais je suis certain que la fourche avant était un système à parallélogramme avec un amortisseur à disques de friction. En confrontant mes souvenirs aux images qu'on peut trouver sur internet, voici ce que j'ai trouvé de plus ressemblant:

     Breguet et Jonghi

    Et c'est sur cette moto que somme allé, en famille, voir l'oiseau de métal posé sur son champ de blé du coté d'Estrablin. Nous n'avons malheureusement pas de photo de cette expédition et vous allez donc devoir vous contenter de la description que je vais en faire.

    Il y a, bien sûr, aux commandes de l'engin papa, votre serviteur se trouve assis devant lui, à califourchon sur le réservoir. Derrière, sur le siège qui se trouve au dessus de la roue arrière, maman est installée. Entre les deux parents, Mireille est coincée, maintenue à gauche comme à droite par les les bras de maman qui étreignent le buste de papa. C'est cet improbable équipage d'une moto chargée de quatre personnes, sans casques - celui-ci ne sera rendu obligatoire sur les motos qu'en mil neuf cent soixante treize- qui a pris la route au départ de Saint Pierre de bœuf, où se trouvait à cette époque le domicile familial, pour parcourir la trentaine de kilomètres qui mène à Estrablin.

    Ceux des lecteurs de ce blog qui connaissent bien notre famille se demandent peut-être pourquoi Jean Paul, notre jeune frère, qui avait trois ans et demi, a été privé de cette visite. J'ignore si sa participation a été envisagé, mais il est probable que dans l'impossibilité de trouver une solution "raisonnable" pour il prenne place sur la Jonghi, il soit resté à la maison, confié aux soins de sa grand-mère.

    Ce voyage ne fut pas le seul à être fait dans ces conditions. lors d'un contrôle de la gendarmerie, au cours d'une de ces expéditions, le responsable et conducteur de la moto s'en est sorti avec des explications acrobatiques mais apparemment convaincantes. 

    On pourrait croire que cette confrontation avec la maréchaussée, un peu risquée en cas de récidive, a mis un terme à ce mode de transport familial, mais ma sœur dont la mémoire est sur ce point plus fiable me signale qu'il n'en fut rien. Une mesure bien plus pertinente fut prise, qui consistait à faire descendre les passagers un peu avant l'endroit où la police officiait, à les faire passer à pieds devant eux pour remonter sur la moto un peu plus loin. Le fait que les gendarmes aient eu la gentillesse de s'installer toujours au même endroit, au bas de la côte au nord du village de Saint Pierre de Bœuf, au lieu dit la bascule, garantissait le succès de l'opération.


    1 commentaire
  • Lors de son mariage avec Marie Marguerite Poulet, le dix sept juin mil sept cent quatre vingt trois, dans l'église de Viarmes, Pierre André Bourgeois ne se doute probablement pas qu'il entame avec son épouse une aventure personnelle qui lui vaudra, plus de deux siècle plus tard, d'occuper une petite place sur ce grand théâtre que constitue Internet aujourd'hui.

    Voici la liste des enfants de ce couple:

    • Marguerite Françoise Anastasie, qui vient au monde le seize mars mil sept cent quatre vingt quatre, la pauvre ne vivra que quelques semaines.
    • Marguerite Alexandrine qui naît deux ans plus tard, le dix huit mai mil sept cent quatre vingt quinze. Elle épousera en mil huit cent neuf Jean François Davanne, à Viarmes.
    • Charlotte Justine née le premier août mil sept cent quatre vingt sept. Son prénom va devenir Marie Charlotte Justine lors de son mariage avec Charles Papelard, à Viarmes, en mil huit cent huit.
    • Honorine Anastasie, née le quinze avril mil sept cent quatre vingt neuf, qui va épouser François Sylvestre Soret, toujours à Viarmes en mil huit cent dix.
    • Constance Antoinette félicité, née le douze décembre mil sept cent quatre vingt dix, future épouse de Pierre Victor Floury dont le mariage sera célébré, comme celui de sa sœur Honorine Anastasie en mil huit cent dix.
    • Augustine Emilie, née le cinq janvier mil sept cent quatre vingt treize qui ne vivra qu'un jour
    • Marguerite Mélanie, née le dix neuf juillet mil sept cent quatre vingt quatorze qui va mourir en janvier de l'année suivante
    • Aimable Alexandrine née le neuf juin mil sept cent quatre vingt seize
    • Louise Julienne, née le huit janvier mil huit cent

    Si vous avez compté avec moi, vous savez que le couple a eu neuf enfants, ce chiffre parait élevé aujourd'hui mais n'a rien d'exceptionnel pour l'époque. On est même loin du record établi dans l'arbre familial par Jacques Chalot et ses trente enfants.

    Plus étonnant, les neuf enfants de Pierre André Bourgeois et Marie Marguerite Poulet sont des filles ! Suivant les lois de la statistique une telle situation n'avait qu'une chance sur cinq cent douze de se produire. Sachant l'importance qu'avait alors la présence d'un héritier male, on imagine la déception du couple au fil des accouchements. Devenir les héros d'un billet sur un modeste blog au vingt et unième siècle est tout de même une forme de compensation posthume.

    NB: je vous ai épargné la lecture des actes de baptême, mariage et décès de toute cette famille, ils ne présentaient pas d'intérêt particulier.

     

     


    votre commentaire
  • Au fil de mes recherches dans le Val d'Oise, j'ai "fait la connaissance" d'Etienne Victor Etard qui est né à Belloy en France le dix novembre mil sept cent quatre vingt six. Je dois cette rencontre à son frère aîné, Jean Charles qui a épousé à Viarmes, le deux janvier mil huit cent dix, Antoinette Adélaïde Lobjeois. Ce sont les arbres déposés sur geneanet par Maud Dagneaux et A.Thirard qui m' ont fourni les informations utiles à la rédaction de ce billet.

    Voici l'acte de naissance d'Etienne Victor:

    Mourir à Dantzigl'an mil sept cent quatre vingt six le dix novembre

    nous soussigné vicaire avons baptisé Etienne Victor

    né le même jour du légitime mariage de Jean

    Charles Etard carrier et de Geneviève Rose

    Desjardins son épouse le parrain Jean Louis

    Etard garçon qui a signé avec nous, la marraine

    Françoise Gabriele Desjardins fille qui a déclaré

    ne savoir signer de ce interpellée, tous de cette paroisse. 

    Avant même d'avoir vingt ans, Etienne Victor est incorporé au 44eme régiment d'infanterie de ligne, le trente et un octobre mil huit cent six.

    Il porte le numéro matricule 2917 et voici la fiche qui lui est consacrée, issue des archives des armées napoléoniennes.

    Mourir à Dantzig

     

    Le malheureux Etienne Victor Etard est donc mort des suites de fièvre à l'hôpital de la bourse, à Dantzig, pendant la guerre qui a opposé les armées napoléoniennes à la quatrième coalition des monarchies européennes. J'ai écrit Dantzig car au moment où ces faits se sont produits, cette ville appartenait au royaume de Prusse. Aujourd'hui on dirait Gdansk puisque cette ville, située sur les rives de la mer baltique, à l'embouchure de la Vistule, est polonaise.

    Selon les historiens, mil huit cent sept marque l'apogée de la domination de Napoléon sur le continent européen. La ville de Dantzig est occupée par une garnison composée de 11000 hommes,  prussiens et russes commandés par Friedrich Adolf von Kalckreuth. Face à eux le maréchal Lefevre dispose de 27000 hommes, dont 10000 français, des divisions polonaises et italiennes. Le siège de la ville commence le dix neuf mars et se termine par une capitulation des assiégés le vingt quatre mai.

    Les pertes sont très lourde du coté des assiégés, bien moindre du coté des assaillants. Nous ignorons à quelle date Etienne Victor Etard a été admis à l'hôpital et donc si il a participé aux combats.


    votre commentaire