• Un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

    Dans ce troisième et dernier volet de ce billet au titre énigmatique, nous allons nous intéresser à Nicole Toquiny, fille de Charles Auguste et Nicole Deslogis et petite fille de François et Nicole Douceur. Nicole est la nièce de Marie Magdelaine Toquiny que vous connaissez pour être la représentante de la branche de François Toquiny à la dixième génération du cas que nous avons examiné dans les deux premiers volets de ce billet.

    Nicole épouse François Cochinat le 26 novembre 1734

    Examinons l’acte dressé à cette occasion.

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

      

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

     

    François Cochinat trompette dans les gardes du roy

    fils de défunt françois hiérôme Cochinat vivant ecuyer trompette

    des gardes de S.A.R Monseigneur le duc d’Orléans et d’Anne

    Jacqueline Hubert demeurant à paris rue jean saint denis

    paroisse saint germain l’auxerrois ses père et mère d’une part

    et Nicole Toquiny fille de maitre Charles Toquiny procureur

    fiscal de la terre et signeurie de Viarmes et Nicole Deslogis

    ses père et mère tous de cette paroisse d’autre part. Après les

    publications de trois bans fait aux prônes de nos messes

    paroissiales par trois jours de dimanches consécutifs dont le

    premier a été fait le dimanche troisième novembre et les deux autres

    les deux dimanches ensuivant sans qu’il s’y soit trouvé

    aucun opposition ni empêchement les fiançailles célébrées le

    jour précédent ont été mariés le lendemain vingt sixième jour

    du mois de novembre mil sept cent trente sept par moi prêtre

    curé soussigné. Après qu’il nous est apparu la copie du

    certificat de mort dudit défunt François Hiérôme Cochinat délivré

    par monsieur de saint germain commandant les gardes du corps

    de S.A.R monseigneur le duc d’Orléans en date du quatre

    octobre mil sept cent six portant que ledit Cochinat est mort

    en l’hôpital des officiers de Cazal les vingt six septembre

    audit an et suivant l’acte de dépôt dudit certificat déposé par ladite

    Anne Jacqueline Hubert en main de Durand et Delembert notaires

    ….

    … comme aussi il nous

    est apparu l’acte de consentement de ladite Jacqueline Hubert

    par lequel elle déclare et consent que ledit François Cochinat

    son fils épouse ladite Nicole Toquiny sans que sa présence

    soit nécessaire, ledit acte passé par devant les notaires

    dessus nommés en date dudit jour treize novembre audit

    an mil sept cent trente sept et ont signés ainsi Anne Jacqueline

    Hubert ?  Hunel et Bontemps et à coté est écrit scellé ledit

    jour et an. Ledit François Cochinat assisté de Hiérôme

    Cochinat son frère ?? commandant des ordres de saint jean

    de latran et de François Vernaud garçon des appartements du roi à vincennes

    ladite Nicole Toquiny assistée dudit maître Charles Toquiny

    son père et de Charles Toquiny son frère greffier du baillage 

    de Viarmes et autres parents qui ont signés.

    Voici donc l’arrivée, parmi les vignerons et autres laboureurs qui peuplent l’arbre généalogique familial, des premiers musiciens de l’ancien régime qui viennent se joindre à ceux qui lisent ces lignes. Un clin d’œil à mes contemporains dont l’une a joué du même instrument que les Cochinat avec la musique des sapeurs-pompiers de l’Essonne ainsi qu’aux autres, plus portés sur le grattage des cordes.

    Mais revenons à notre famille de trompettistes de l’ancien régime, les Cochinat. Avant François dont nous connaissons le mariage à Viarmes, c’est sans doute à Paris, proche de la cour, qu’il faudrait chercher leurs traces. Et ce n’est jamais une très bonne nouvelle pour un généalogiste que d’avoir à passer par la capitale.

    En effet, pendant la commune de Paris, en mai 1971, les registres paroissiaux ont été détruits dans les incendies de l’hôtel de ville où se trouvait le premier exemplaire et du palais de justice où se trouvait le second. Ces incendies volontaires ont fait disparaître en quelques heures des siècles d’histoire. C’est le côté sombre de la commune de Paris qui a vu, au moment où les poètes tentaient de construire un nouvel ordre social, des fanatiques effacer toute trace de ce qui les avait précédés, comme d’autre ont cherché à le faire plus récemment à Palmyre.

    D’autres sources nous apportent toutefois un certain éclairage sur nos trompettistes et certaines ont été numérisés sous forme de texte, ce qui facilite grandement les recherches, merci à Google. Commençons notre visite.

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

     un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

    Cet épais volume liste les personnes affectées à la maison royale avec leur fonction et leurs gages. Il date de 1727, comme l'indique l'inscription en chiffres romains au bas de la page de couverture. Le système de numération romain, tombé dans l'oubli ou presque, se lit de gauche à droite. Chaque lettre à une valeur et on additionne le tout, M vaut 1000, D vaut 500, C vaut 100, X vaut 10, V vaut 5 et I vaut 1. M.DCC.XXVII vaut donc bien 1727. Voici ce qu'on trouve à la page 400 de ce document :

     

     

    Didier Jerôme Cochinat, le frère de François, qui est cité comme commandeur de l'ordre de Saint Jean de Latran au mariage évoqué au début de ce volet était donc, lui aussi, trompettiste. Nous savons grâce à ce texte et à l'acte de mariage de François Didier Jerôme, qu'il était, comme son père François Hiérome, au service du duc d'Orléans. Peut-être d'ailleurs jouaient-ils de leur instrument devant des personnes différentes puisque le titre de duc d'Orléans a été porté successivement par de nombreux Bourbons, frères cadets du roi en place. Mais le but ici n'est pas de s'occuper de la généalogie de la famille royale, ce que d'autres ont fait bien mieux que je le saurais. Didier Jerôme est donc resté au service de la maison Orléans après le décès du duc et ses gages sont de 100 livres. Ceux des lecteurs qui seraient tentés par l'intégralité des 730 pages que contient le document dont j'ai extrait les pages ci-dessus n'ont qu'à suivre ce lien :l'état de la France tome II

    Avançons un peu jusqu'en l'an 1749 avec même document sur l’état de la France 

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

    C'est l'occasion de compléter notre cours sur la numération romaine, la première partie est sans mystère, "M" valant mille +  "D" valant 500 et deux "C" valant chacun 100 font bien 1700. Ensuite nous avons un "X" valant 10 qui précède un "L" valant 50, cette inversion dans l'ordre des poids signifie que les plus faible doit être retranché du plus fort, ce qui donne 40. Même chose, pour les unités, "I" doit être retranché à "X" ce qui donne 9, le total fait bien 1749. Passons à la page 223 du document.

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

      

    En 1749, les deux frères Cochinat sont attachés à la maison du roi, Didier Hiérome à donc abandonné le duc d'Orléans pour rejoindre son frère François.

    Notez aussi que les gages des trompettistes qui étaient de 100 livres en 1737 sont dorénavant de 180 livres.Que valent ces 180 livres ? il est bien difficile de dire quel pouvoir d’achat elles représentent. Tout au plus peut on dire qu'en 1739 une livre valait 0,31 gramme d'or, à l'heure où j'écris ces lignes un gramme d'or vaut 3,4€. les gages d'un trompettiste représentent donc 180 x 0,31 x 3,4, soit environ 190€.

    Projetons nous maintenant en 1773

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

     

    ce volume datant de 1773 donne la liste des personnes au service du roi pour ce qui concerne les spectacles.

    ce sont les pages 41 et 42 de ce document qui nous intéressent.

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

      

    un implexe Val d'Oisien et quelques trompettistes (III)

     

    Ces lignes nous apprennent que Didier Hierome a disparu - au moins de la liste des musiciens attachés à la maison du roi- et que François Cochinat est dorénavant un des quatre Trompettes ordinaires de la chambre du roi et qu'il accompagnait donc celui-ci dans ses déplacements. Peut-être connaîtrons nous un jour quel âge il avait à ce moment. Il faudrait pour cela que nous trouvions soit son acte de naissance, ce qui est peu probable, soit son acte de décès avec mention de son âge, acte qui se trouve peut-être dans les milliers de pages de registres de Viarmes qui restent à dépouiller. Il ne devait pas être tout jeune puisque son mariage avec Nicole Toquiny a été célébré 36 ans avant l'impression du document sur l'état de la musique du roi.

    Contrairement aux documents sur l'état de la France, riches des seuls noms qu'il contiennent, celui commence par un passionnant historique des musiciens sous l'ancien régime. Si ce sujet vous intéresse, suivez ce lien : état actuel de la musique du roi . 

    Voila donc expliquée, grâce aux traces qu'ont laissés nos souffleurs, l'énigme du titre de ce billet. Il n'est pas du tout impossible qux'ils réapparaissent un jour dans ce blog, car les recherches continuent.

    Donc à bientôt, peut-être


  • Commentaires

    1
    Cécile
    Mercredi 2 Novembre 2016 à 21:05

    C'est fou, trompettiste du roi!

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