• Le château de l'Arbalète (1)

    Ce blog est silencieux depuis de nombreux mois, la faute aux nombreux projets qui m'occupent et me détournent de mes recherches dans les poussiéreuses traces du passé. Mais cet attrait pour le passé et les énigmes qu'il cache sont un virus contre lequel aucun vaccin ne nous protège.

    C'est ma passion - encore une - pour la marche qui m'amène à reprendre la plume. En effet je fais, avec mon épouse, régulièrement le tour des lacs de Viry. Cette agréable promenade fait en une dizaine de kilomètres le tour d'anciennes carrières que l'eau de la Seine à envahi. Bordée par la nationale 7, les voies du RER D et les collines de Grigny et de Viry Chatillon qui surplombent la vallée de la Seine, cet environnement pas particulièrement paisible est devenu un havre pour de nombreux oiseaux. Nullement dérangés par le bruyant trafic ferroviaire et routier, de nombreux migrateurs font une halte ici. Je devrais d'ailleurs plutôt écrire faisaient une halte car, du fait de  la douceur des hivers et l'abondance de poisson, des espèces, telles les bernaches du canada, ont élus domicile ici de façon permanente. On y voit aussi de nombreux cygnes, des cols verts, des foulques macroule, des sternes, des cormorans, quelques grèbes huppés et hérons. Des grues blanches y passent parfois. La végétation abrite de nombreux petits oiseaux dont je serai bien incapable de donner le nom.

    Voici, extraite du site Géoportail, une vue de cet ensemble d'étendues d'eau parsemées d'îlots que constituent les lacs de Viry.

    Le château de l'Arbalète

    Le détail qui m'amène à reprendre la plume se trouve à l'extrémité ouest du lac de l'Arbalète. Il s'agit des vestiges d'une imposante clôture en fer forgé.

    Le château de l'Arbalète

     

    L'ouverture centrale de cette clôture débouche sur une double allée de marronniers.

    Le château de l'Arbalète

    Du portail qui fermait cette clôture ne subsiste qu'un bandeau central avec un motif en volutes forgées.

    Le château de l'Arbalète

      

    Ces vestiges ainsi que le bel alignement de marronniers ne laissent aucun doute, il y a eu ici autrefois un édifice d'importance.

    L'examen des autres cartes disponibles sur Géoportail est le premier pas de notre recherche sur ce mystérieux bâtiment.

    Voici la même zone, telle qu'on la trouve sur la carte d'état major qui fut tracée entre 1818 et 1824.

    Le château de l'Arbalète

     

    A l'endroit précis où ont été prises les photos que vous pouvez voir plus haut, on trouve sur la carte la mention Château de l'Arbalète. Nous connaissons donc maintenant le nom du bâtiment qui se trouvait là jadis.

    J'ai ajouté sur cette carte quelques repères pour en faciliter la lecture. Je vous conseille de cliquer sur la carte pour l'agrandir. Le repère 1 pointe le corps du château lui même qui a disparu sur le terrain bien sûr, mais aussi sur la carte actuelle. Les communs du château, au repère 2, ont été préservés et sont visibles sur la droite de la première photo. La clôture se trouve au repère 3 et la double allée de marronniers est présente au repère 4. La route repérée en 5 qui est nommée sur la carte "route de Paris à Lyon" est devenue la nationale 7. Et le repère 6 pointe sur la voie de chemin de fer qui est devenue la branche vallée du RER D.

    La comparaison des deux cartes nous en apprend beaucoup sur ce qui s'est passé dans cette région en deux siècles. La première, qui saute littéralement aux yeux, est que de ce que nous appelons aujourd'hui les lacs de Viry rien n'existait au début du dix-neuvième siècle. L'exploitation des carrières pour extraire sable et pierres meunières a commencée en 1905 pour s'arrêter en 1960. On voit aussi que l'allée bordée de marronniers, qui aujourd'hui s'arrête brutalement lorsqu'elle atteint les eaux de l'étang de la plaine basse atteignait autrefois la très importante route de Paris à Lyon. C'est en empruntant cette majestueuse allée qu'on accédait au château de l'Arbalète.

    Le tracé chemin de fer à lui aussi considérablement évolué en deux siècles. La ligne parallèle à la route de Paris à Lyon avait son terminus à Corbeil. Si vous êtes un usager familier de la ligne RER D vous savez qu'elle est aujourd'hui prolongée jusqu'à Malesherbes d'une part et qu'elle traverse la Seine à Corbeil pour rejoindre le réseau ferré de la rive droite. De même, entre Viry Chatillon et Corbeil, la ligne longe la Seine alors qu'aujourd'hui, en plus de ce tracé une variante desservant le plateau dans les communes de Grigny, Ris Orangis et Evry-Courcouronnes a été créée. Pour être tout à fait complet et rigoureux, il faut signaler une incohérence de date entre certains des documents : la carte d'état major utilisée dans ce billet est censée, selon géoportail, avoir été tracée entre 1818 et 1824 la présence de la ligne de chemin de fer Paris Corbeil est donc anachronique puisqu'elle a été inaugurée le 17 septembre 1840.

    Enfin, dans une grande partie de ce territoire, les parcelles de terre cultivée ont laissé la place des pavillons ou des tours d'immeubles.

    La carte de la zone établi par Cassini mentionne aussi le château de l'arbalète, avec beaucoup moins de détail :

    Le château de l'ArbalèteLe nom du bâtiment étant connu, une recherche sur Internet s'impose. Cette recherche nous renvoie plusieurs photographie du château de l'Arbalète, sous forme de cartes postales.

    Le château de l'Arbalète (1)

     

    Sur cette photo de la face principale du château, prise depuis l'allée des marronniers, on distingue parfaitement le détail de l'ornement du portail qu'on peut voir encore aujourd'hui et dont je vous ai proposé une photo plus haut dans ce billet.

    Le château de l'Arbalète (1)

     

    Cette autre photo nous montre l'arrière du château. Il s'agit là encore d'une carte postale et elle porte une mention selon laquelle une légende voudrait que le château ait été construit par Henri IV pour Gabrielle d'Estrées, sa favorite.

    En fait tous ceux qui se sont penché sur l'histoire de ce château, qui est un édifice relativement mineur, sont arrivé à la conclusion que c'est Gui de l'Arbaleste, seigneur de la Borde et gouverneur de Melun qui a fait construire cette "maison des champs". La fiche Wikipedia de la commune de Grigny  donne l'année 1552 pour la construction du château. Le nom qu'a toujours porté  ce château donne beaucoup de crédit à l'hypothèse qu'il en fut le bâtisseur.  

    Donc, Henri IV n'a pas construit ce château, mais y a t'il séjourné ? La fiche Wilipedia évoquée plus haut nous apprend que le château a été ouvert, dès la signature de l'édit de Nantes, aux fidèles de l'église réformée pour la pratique de leur culte. Si le Vert Galant est venu ici dans ce cadre il s'agit d'une remise en cause plutôt radicale de la légende : on passe des galipettes avec la belle Gabrielle à d'austères sermons !

    Mes recherches sur ce château dans les premiers siècles de son existence ne m'ont pas permis d'en écrire plus. Par bonheur, l'administration  républicaine met à notre disposition, par le biais des archives départementales, un matériel bien plus abondant pour la période entre la révolution et la destruction du château au début du vingtième siècle. Ce sera l'objet d'un second billet.

     

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Jeudi 4 Avril à 20:14

    Ma Sœur, lectrice attentive de ma prose, relève d'impardonnables anachronismes dans mon texte que je m'empresse de corriger. Je présente mes humbles excuses à tous ceux que j'ai offensé avec la première version.

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